Dans le cadre du Festival Radio France Montpellier Languedoc-Roussillon, la Sacem propose, pour la septième année, une sélection de films documentaires sur la musique, projetés chaque jour à 15h, Salle Einstein, au Corum. L'entrée est libre.

Photo Bruno Pothet © DR

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CYCLE LE VIOLON SELON BRUNO MONSAINGEON

CONCERT DE BRUNO MONSAINGEON 
ET VIKTORIA POSTNIKOVA     
24 juillet 2010 - 17h - Salle Pasteur

Programme du concert 
Jean-Sébastien Bach
Choral "O Mensch bewein deine Sünde gross"
Transcription Bruno Monsaingeon
Alto et piano - 2ème partita en ut mineur
Sonate en si mineur pour violon et clavier
César Franck
Prélude et Variation
Transcription Bruno Monsaingeon
Alto et piano
Sonate pour violon et piano




Photos Bruno Pothet ©


Film du samedi 24 juillet

L'Art du violon, partie 2

Grand entretien avec Bruno Monsaingeon sur Menuhin, Oïstrakh et quelques autres…
par Olivier Bernard










Partie 5/5


© Alain Le Bacquer

Ces questions, on peut les poser aussi à travers le film en deux
parties qui conclura votre présence à Montpellier, L’Art
du violon. La réalisation de ce film n’est-elle une réponse
à toutes les questions posées par l’archivage ?

 
C’est un film qui, sur le plan du contenu, a eu beaucoup de problèmes parce qu’il rentrait dans une série très formatée qui avait été élaborée par Steven Rwight pour la BBC. Et c’est un film que l’on est venu me proposer, même si j’avais déjà de moi-même l’idée d’un tel projet.

Une commande autrement dit…

 
Oui, et je me suis tout de suite attelé à la tâche, en pondant a bout de quelques mois un scénario qui a été rejeté parce qu’il constituait une approche trop personnelle, qui ne rentrait pas dans le cadre de la BBC. Deux ans plus tard, du fait que j’avais mené beaucoup de recherches sur Menuhin, sur Oïstrakh, et sur une quantité d’autres violonistes, ils sont revenus vers moi. Et je leur ai proposé un scénario qui n’était pas très éloigné du premier qui était Le Démon du violon et Au-delà du violon et qui a été accepté. Mon propos était de montrer que le violon est un instrument dangereux. En ce sens qu’il est tellement beau, comme la voix humaine, et qu’il fait appel à des sentiments profonds, intimes, cachés… 


C’est l’histoire du Violon de Crémone d’Hoffmann. C’est l’image du vertige, de la séduction perverse, du pacte avec le diable…

 
Exactement. Cet instrument a quelque chose de dangereux en soi, parce qu’il est en soi l’émetteur de l’émotion et l’on se fiche un peu de la musique qui va avec. Chez de très grands violonistes tels que Heifetz ou même Milstein, il me semble qu’il y a une obsession pour le violon en tant que tel. Alors qu’il y a dans la musique une autre dimension, qui moi, finalement, m’intéresse beaucoup plus. Le piano est très différent. Prenons de très grands
instrumentistes, Gould, plus que tous, mais aussi Richter, Anderszewski ou Postnikova ; chez eux, l’instrument n’est jamais qu’un véhicule pour exprimer une relation directe avec la musique, même si l’instrument ne disparaît pas pour autant puisqu’il doit être maîtrisé et exploité totalement. Au-delà du violon rend compte de la même expérience puisqu’elle
est évidemment possible avec les plus grands violonistes. Alors que dans Le Démon du violon je mets plutôt l’accent sur ceux, immenses artistes bien sûr, mais qui ont cédé à la tentation des oeuvres et des répertoires relevant de la seule virtuosité. 

Cette double approche s’inscrit dans le cadre d’une interrogation essentielle : qu’est ce qu’un grand violoniste ? Et l’idée qui est développée dans tout le film se résume à un seul mot : le son, la sonorité qui n’appartiennent qu’à quelques uns.
Le film démarre avec le 1er mouvement du Concerto de Mendelssohn selon un procédé strictement cinématographique, avec un montage dans la continuité et dans lequel on voit et on entend successivement dix violonistes différents : Oïstrakh, Stern, Ferras, Kreisler, Milstein, Menuhin, (par deux fois et à des âges différents), Grumiaux, Heifetz et Elman.
On n’a pas besoin d’expliciter ou de commenter, on entend, je crois, de manière perceptible l’extraordinaire différence sonore qui existe entre eux.

Le choix des intervenants, issus de générations plus jeunes esquisse-t-il un présent de L’Art du violon ?

 
Le choix des intervenants, des « témoins » qui réagissent aux archives a fait l’objet de soins très attentifs. D’une part, l’ouvrir à deux personnalités qui étaient proches des artistes évoqués, proches du monde russe et européen et capables de parler d’eux de première main, pour les avoir côtoyés : Ida Haendel et Ivry Gitlis, l’une et l’autre, hauts en couleurs et pouvant eux-mêmes apparaître dans le film à titre d’archives. 

En second lieu, j’ai souhaité qu’il y ait le violoniste le plus réputé de la génération intermédiaire et j’ai demandé à Itzhak Perlman de s’y prêter et je dois dire qu’il l’a fait d’une manière vraiment sérieuse. Enfin, deux très jeunes artistes, Hilary Hahn et Laurent Korcia, tous deux au talent incandescent, dont on mesure aujourd’hui le chemin qu’ils ont parcouru, depuis la réalisation du film, il y a dix ans. Ivry Gitlis, lui aussi, a été merveilleux, difficile à cadrer. Mais ça, je m’y attendais! C’est l’un des plus doués parmi les violonistes du 20è siècle, lui aussi possède un son qui est identifiable entre tous… Et, en plus, j’ai réintégré des témoignages posthumes, que j’avais pu capter avec Menuhin et Rostropovitch, par exemple. 
De tout cela, j’ai fait un montage qui, je crois, n’est pas un fourre-tout, ce que je reprochais aux autres films de la série « L’Art de … ». Avec ce type de travail de synthèse, on est absolument obligé d’être un auteur, de signer. Bien entendu, c’est un film subjectif. Mais j’espère que son intérêt va au-delà du violon. C’est un film qui peut captiver un public beaucoup plus large. De toute façon, je n’ai pas vocation à faire des films ultra-spécialisés qui seraient des équivalents de thèses en Sorbonne…
Ce n’est pas du tout mon objectif. Je veux avant tout que naisse une émotion proprement musicale. Et je crois, j’espère, y être arrivé avec L’Art du violon.